Les supermarchés Auchan en passe de devenir des Intermarché et Netto
Le secteur de la distribution poursuit sa transformation. En difficulté, Auchan prévoit de basculer en franchise, sous bannière Intermarché et Netto, ses quelque 300 supermarchés. C’est un « nouveau coup de massue » pour les salariés du groupe nordiste, qui conservera les hypermarchés à son nom.
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Le projet, « soumis à l’autorisation préalable des autorités de la concurrence compétentes », pourrait « prendre effet fin 2026 », a précisé Auchan, propriété de la famille Mulliez, dans un communiqué de presse, le 25 novembre 2025. Concrètement Auchan Retail, la branche distribution du groupe, envisage de créer une « entité juridique dédiée » pour exploiter les magasins changeant d’enseigne, via un contrat de franchise conclu avec Intermarché/Mousquetaires.
Une enseigne fournit les murs et le personnel, l’autre la marchandise
« Les fonds de commerce, l’immobilier restent propriétés d’Auchan, les salariés restent des salariés d’Auchan, et on travaillera sous enseigne Intermarché, qui nous livrera les marchandises, la politique commerciale, le concept magasin », a expliqué à la presse Guillaume Darrasse, directeur général d’Auchan Retail.
« C’est quelque chose qui va nous renforcer » avec des supermarchés qui bénéficieront « de l’ensemble des facteurs de compétitivité » d’Intermarché, notamment « la capacité à offrir des prix performants aux consommateurs, ce qui est indispensable dans un marché de plus en plus compétitif », a justifié le patron du cinquième distributeur alimentaire en part de marché (8,6 %, selon Kantar Worldpanel).
L’opération doit permettre à Auchan de faire baisser les prix dans ses supermarchés, de 6 à 8 % selon une source proche du dossier, tout en continuant le « travail » sur ses 117 hypermarchés, dont 20 sont « en refonte complète », d’après Guillaume Darrasse. « Ce n’est pas un modèle du passé », a-t-il insisté, précisant que son groupe vient de se refinancer à hauteur de 1,8 milliard d’euros.
Au total, le groupe compte 294 supermarchés, dont 261 intégrés et 33 franchisés. Ces derniers devront déterminer si le changement d’enseigne est une opportunité, « ce dont je ne doute pas », a estimé Guillaume Darrasse.
Une position de choix pour racheter les magasins à terme
De son côté, Intermarché, qui a déjà réalisé deux opérations massives de reprise en deux ans — près de 300 magasins Casino en 2023-2024, et 81 magasins Colruyt mi-juin — se retrouverait en pole position pour éventuellement acquérir à terme ces supermarchés Auchan.
Ce deal « gagnant-gagnant » va « nous permettre d’étendre notre emprise sur le marché français », s’est félicité le patron des Mousquetaires, Thierry Cotillard. Les supermarchés d’Auchan représentent deux points de part de marché, et les Mousquetaires visent 20 % en 2028, a-t-il souligné (contre 17,7 % en octobre selon Kantar Worldpanel).
Auchan, qui a repris en 2024 près de 100 magasins Casino, vient de céder 19 magasins à Lidl, dont 9 ex-Casino. L’annonce sur la transformation de 300 supermarchés Auchan en Intermarché et Netto s’inscrit dans un « partenariat plus large » entre les deux groupes, déjà marqué par une alliance de dix ans dans le domaine des achats, a rappelé Thierry Cotillard.
Une « onde de choc » pour les salariés
Les 11 000 salariés des magasins intégrés (3,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires) conserveront-ils leur régime actuel ? « Leur statut résultera du dialogue social dans le cadre du groupe Auchan, dans les règles normales du droit du travail », répond Guillaume Darrasse. La présentation du projet mardi aux instances du personnel a provoqué « une onde de choc », considère René Carette, délégué syndical central à la CFDT Auchan, selon qui « toutes les organisations sont sorties de la réunion suite à l’annonce ».
« Il y a un an, on nous annonçait un plan social [avec près de 2 400 suppressions d’emplois, N.D.L.R.] et aujourd’hui coup de massue » avec « 11 000 salariés sacrifiés », envoyés à la « concurrence avec leurs acquis sociaux en moins et une incertitude » quant à leur reprise, s’est-il indigné. Pour Djamal Otmani, délégué central à la CFTC, syndicat majoritaire, « c’est dramatique pour toutes ces familles. »
Gilles Martin, délégué CFDT, a affirmé qu’après un passage en franchise, sur le long terme, « les salariés peuvent perdre jusqu’à 2 000, 2 500 euros en moyenne par an ». « Ce qui peut être rassurant, c’est que le groupe Intermarché », troisième distributeur français, « a les reins très solides », a-t-il ajouté, estimant toutefois qu’un accompagnement des salariés sera nécessaire. « On veut qu’Auchan s’engage à maintenir tous les emplois et tous les acquis sociaux », a ajouté Franck Martinaud, délégué syndical Retail France FO.
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